Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Histoire (aussi) vraie (que possible) de Jeanne d'Arc - 3/3

    La fin.

    • Le siège de Paris

    Dans la foulée du sacre Jeanne tente de convaincre Charles 7 de reprendre Paris.

    Sous l'impulsion de Jeanne, après plusieurs escarmouches sur diverses portes, l'assaut est donné à la porte saint Honoré. Jeanne est blessée à la cuisse par un carreau d'arbalète. Le roi lui donne l'ordre de se replier. Après quatre heures d'assauts infructueux, le roi sonne la retraite et il finit par interdire tout nouvel assaut car l'argent et les vivres manquent.

    Jeannee au siège de Paris

    Jeanne au siège de Paris

    En octobre et novembre 1429 quelques sièges de villes ont encore lieu mais devant La Charité sur Loire c'est un échec et le siège est abandonné. Pour noël Jeanne regagne le village de Jargeau.

    L'armée royale fait alors retour vers la Loire où elle est dissoute.

    Début 1430 Jeanne est conviée à rester à Sully sur Loire. Néanmoins Jeanne repart en campagne ; elle conduit sa propre troupe et se considère comme cheffe de guerre indépendante, sans beaucoup de succès malgré son charisme et son courage – elle sera blessée plusieurs fois.

    Cependant le roi qui a obtenu ce qu'il voulait, à savoir être sacré roi, lâche Jeanne d'Arc, d'autant plus qu'il négocie maintenant avec les Bourguignons car il considère que la guerre coûte trop cher et que l'essentiel est acquis.

     

    • Le siège de Compiègne et la capture

    Début mai Jeanne quitte le roi à la tête d'une compagnie de volontaires et se rend à Compiègne pour libérer la ville assiégée par les Bourguignons. Lors d'une sortie aux portes de la ville, le 23 mai, elle est faite prisonnière par les Bourguignons.

    Capture de Jeanne

    la capture de Jeanne d'Arc

    Le duc de Bourgogne vient la visiter et il la confie au seigneur bourguignon Jean de Luxembourg qui la traite bien.

    Pour prévenir un éventuel coup de main des Français, elle est transférée au château de Beaulieu, situé à environ 35 km au Nord de Compiègne ; elle y fait sa première tentative d'évasion.

    Il est alors décidé de la transférer loin de la zone des combats, environ 60 km plus au nord, au château de Beaurevoir, où elle se blesse sérieusement en sautant vaillamment par une fenêtre en tentant de s'évader une nouvelle fois.

    Elle est vendue aux Anglais le 21 novembre 1430, pour dix mille livres, une somme très importante, et confiée à Pierre Cauchon, évêque de Beauvais, ancien recteur de l'Université de Paris et allié des Anglais.

    Les Anglais l'emmènent à Rouen où se situe leur quartier général et où elle est étroitement enfermée dans une tour du château.

     

    • Le procès et la condamnation

    Lors de son procès qui dure du 21 février au 23 mai 1431, elle est accusé d'hérésie. Jugée par l'Église, Jeanne d'Arc est néanmoins emprisonnée dans une prison civile, au mépris du droit canonique.

    Si ses conditions d'emprisonnement sont particulièrement difficiles, Jeanne n'a néanmoins pas été soumise à la question, bien qu'elle en ait été menacée.

    Pour les Anglais le procès de Jeanne doit démontrer qu'elle est une sorcière et, alors, le sacre de Charles 7 n'aura aucune valeur.

    Environ cent vingt personnes sont choisies avec soin. Lors du procès de réhabilitation, plusieurs témoignèrent de leur peur. Ainsi, Richard de Grouchet déclare que « c'est sous la menace et en pleine terreur que nous dûmes prendre part au procès ; nous avions l'intention de déguerpir. » Pour Jean Massieu, « il n'y avait personne au tribunal qui ne tremblât de peur. » Pour Jean Lemaître, « Je vois que si l'on n'agit pas selon la volonté des Anglais, c'est la mort qui menace. ».

    Toutefois pendant le procès les enquêteurs ne parviennent pas à établir un chef d'accusation valable :  Jeanne semble être une bonne chrétienne, convaincue de sa mission, différente des hérétiques qui pullulent à l'époque.

    Les juges ont rapidement fait vérifier la virginité de Jeanne, car une vierge ne peut pas être une sorcière, c'est ainsi. C'est donc un coup dur pour les Anglais qui ne peuvent plus faire condamner Jeanne comme sorcière.

    Le 21 février, la séance est ouverte dans la chapelle royale du château de Rouen où Jeanne est citée à comparaître. Sa prestation de serment pose problème à ses juges.

    « Jeanne, je vous requiers encore de prêter serment de dire la vérité. - De mon père, de ma mère et des choses que j’ai faites depuis que je pris le chemin de France, volontiers je jurerai. Mais quant aux révélations qui me viennent de Dieu, je n’en ai onques rien dit ni révélé à personne, sinon à Charles mon roi; je n’en dirai pas plus, dût-on me couper la tête, parce que mon conseil secret — mes visions, j’entends — m’a défendu d’en dire rien à personne. »

    Jeanne devant son juge

    Jeanne devant son juge

    Interrogée sur sa vie avant et après son départ de son village natal de Domrémy, Jeanne fait face à ses juges, sans se recouper, avec assurance, voire audace.

    « Quel aspect avait saint Michel quand il vous apparut ? Etait-il nu ? - Pensez-vous que Dieu n'ait pas de quoi le vêtir ? - Avait-il des cheveux ? - Pourquoi les lui aurait-on coupés ? »

    Les réponses de Jeanne ont été déformées pour construire l’accusation. Attentive à la lecture des actes, Jeanne nie et renvoie à chaque fois à ses réponses originales.

    Un moment pour faire avouer Jeanne, les juges envisagent de la torturer mais comme sa santé s'est sérieusement dégradée, ils ont peur qu'elle en meure ce qui est un risque politique trop grand ; alors ils ne font qu'un simulacre mais il ne fait pas changer Jeanne d'avis.

    Alors le tribunal lui reproche par défaut de porter des habits d'homme, d'avoir quitté ses parents sans leur autorisation, et surtout de s'en remettre systématiquement au jugement de Dieu plutôt qu'à celui de l'autorité ecclésiastique terrestre. Les juges estiment également que ses voix, auxquelles elle se réfère constamment, sont en fait inspirées par le démon. Soixante-dix chefs d'accusation sont finalement trouvés, le principal étant « imaginant mensongèrement des révélations et apparitions divines ».

    Soucieux de régularité, Pierre Cauchon fait parvenir à Paris l'acte d'accusation, rédigé le 14 mars, qui charge Jeanne des pires horreurs, afin d'obtenir l'avis de l'université. En fait l'acte d'accusation qui est présenté aux docteurs parisiens de l'Université est un texte tendancieux.

    L’université de Paris, alors favorables aux Bourguignons, rend son avis : Jeanne est coupable d'être schismatique, apostate (un apostat est une personne qui renonce publiquement à une religion), menteuse, devineresse, suspecte d'hérésie, errante en la foi, blasphématrice de Dieu et des saints. Jeanne en appelle alors au Pape mais ce sera ignoré par les juges.

    On exhorte Jeanne à se repentir. En public elle refuse mais devant la menace du bûcher elle abjure. Il est dit qu'elle aurait signé d'une croix, ce qui aurait voulu dire que c'était une fausse abjuration. Pourtant on ne sait pas si elle savait écrire mais il est possible qu'elle ait appris à la cour du roi.

    On la réintègre alors dans sa prison en lui donnant des habits de femme et en lui promettant de la transférer dans une prison d'église, gardée par des gens d'église. Mais les Anglais se sentent floués car ils attendaient la mort de l’accusée. Jeanne est donc renvoyée dans la même prison et après avoir subi des outrages et des violences, elle endosse à nouveau des habits masculins pour se protéger. Aux yeux de l’Église, elle devient donc relapse (c'est à dire retombée dans l'hérésie) et le juge n’a d’autre choix que de la livrer au bras séculier pour exécuter la condamnation à mort.

    Le 30 mai 1431, après s'être confessée et avoir communié, Jeanne en tunique de toile soufrée est conduite vers neuf heures, sous escorte anglaise, place du Vieux-Marché à Rouen. Elle déclare : « Évêque, je meurs par vous ! ».

    Jeanne au bûcher

    Jeanne au bûcher

    Le cardinal de Winchester a insisté pour qu'il ne reste rien de son corps. Il désire éviter tout culte posthume de la « pucelle ». Il a donc ordonné trois crémations successives. La première voit mourir Jeanne d'Arc par intoxication par les gaz toxiques issus de la combustion. Le bourreau écarte les fagots, à la demande des Anglais, pour que le public puisse voir que le cadavre est bien celui de Jeanne. La seconde dure plusieurs heures et fait exploser la boîte crânienne. Pour la troisième, le bourreau ajoute de l'huile et de la poix et il ne reste que des cendres et des débris osseux qui sont dispersés dans la Seine afin qu'on ne puisse pas en faire de reliques.

    Au final le procès de Jeanne est un échec pour les Anglais qui voulaient la faire brûler comme sorcière afin que le sacre de Charles 7 n'ait pas de valeur mais ce n'a pas été le cas.

    Le jeune roi d'Angleterre, Henri 6, se fera sacrer roi de France en décembre 1431 dans la cathédrale de Paris, mais son sacre n'est pas accompagné de l'onction par l'huile sainte, ce qui enlève une grande partie de sa valeur. Les rois d'Angleterre se considéreront comme rois de France jusqu'au roi Georges 3 en 1801 !

    couronnement d'Henri 6

    Couronnement du jeune Henri 6 d'Angleterre à Paris

    En 1435 Charles 7 signe la paix d'Arras avec le duc de Bourgogne. Les Anglais sont dès lors inexorablement repoussés, notamment après la prise de Paris en 1436. La guerre de cent ans durera encore quelques années, jusqu'en 1453. La paix est définitivement signée en 1475 par le traité de Picquigny entre Louis 11 et Edouard 4. Cependant les Anglais conservent Calais jusqu'en 1558.

    la France en 1477

    Peu après avoir repris Rouen, Charles VII publie, le 15 février 1450, une ordonnance disant que « les ennemis de Jeanne l'ayant fait mourir contre raison et très cruellement », il veut savoir la vérité sur cette affaire. Mais il faut attendre 1455, et sur la demande de la mère de Jeanne, la révision du procès.

    On peut supposer que le roi voulait ainsi au moins autant conforter la valeur de son sacre que rendre hommage à Jeanne qui l'avait tant aidé.

    Le pape a ordonné à l'évêque de Lisieux et conseiller de Charles VII, d'étudier en profondeur les actes du procès de Jeanne d'Arc. Son mémoire est la condition juridique du procès en réhabilitation. Celui-ci aboutit à casser le premier jugement pour « corruption, dol, calomnie, fraude et malice » grâce au travail de l'inquisiteur Jean Bréhal, qui enregistre les dépositions de nombreux contemporains de Jeanne, dont les notaires du premier procès et certains juges.

    Le jugement, prononcé le 7 juillet 1456, déclare le premier procès et ses conclusions « nuls, non avenus, sans valeur ni effet » et réhabilite entièrement Jeanne et sa famille. Il ordonne également l'« apposition d'une croix honnête pour la perpétuelle mémoire de la défunte » au lieu même où Jeanne est morte.

    Ainsi finit l'histoire de Jeanne d'Arc, jeune paysanne convaincue de sa mission, énergique et hautement charismatique. Le mythe et la légende peuvent commencer !

     

    Remarques.

    J'ai intitulé cet essai, « histoire aussi vraie que possible de Jeanne d'Arc ». En effet comme vous l'avez compris à sa lecture, le rôle de Jeanne est essentiellement politique et chaque partie ne s'est pas privée de l'utiliser à son avantage comme le montrent les deux procès.

    Quel a été son rôle réel dans la guerre ? Avant l'intervention de Jeanne d'Arc, les Anglais bénéficiaient d'un avantage psychologique extrêmement important. En 1429 la dynamique était anglaise. L'avantage numérique du royaume de France pesait peu. Jeanne a eu indéniablement le mérite d'inverser l'ascendant psychologique en faveur de la France, en remontant le moral des armées et des populations, en légitimant et sacrant le roi, et en montrant que la réputation d'invincibilité des Anglais était fausse. Et, comme le dit le pape : « Il n'est pas un homme qui n'accepte d'avoir Dieu pour chef ».

    Les deux sources principales sur l'histoire de Jeanne d'Arc sont le procès de la condamnation de 1431, et le procès en nullité de la condamnation de 1455-1456. Le procès-verbal est rédigé quelques années plus tard sous le contrôle du principal greffier Guillaume Manchon par Thomas de Courcelles. Étant des actes juridiques, elles ont l'immense avantage d'être les retranscriptions les plus fidèles des dépositions. Cependant le procès de 1431 fut retranscrit en latin alors que les interrogatoires étaient en français.

    On ne peut pas la quitter sans rappeler que, même si à cette époque les prophétesses étaient nombreuses, aucune n'a eu un tel retentissement, y compris hors de France, et qu'elle a été l'enjeu d'énormément d'intérêts, politiques comme religieux. Par exemple, l'université de Paris, « remplie des créatures du roi d'Angleterre », ne la voit pas d'un bon œil, à l'opposé des théologiens de Poitiers, composée d'universitaires parisiens exilés par les Anglais.

    Un mot sur l'enjeu de sa virginité. Si « pucelle » signifiait à l'époque simplement « fille » et pas particulièrement « vierge », Jeanne mettait aussi en avant sa virginité pour prouver, selon les mœurs de son temps, qu'elle était envoyée de Dieu et non une sorcière et affirmer clairement sa pureté, aussi bien physiquement que dans ses intentions religieuses et politiques.

    L'opinion de cette époque était en effet formée à ces miracles où la Vierge et les saints venaient délivrer les prisonniers ou sauver des royaumes. Dès lors vérifier sa virginité devient un enjeu important, étant donné l'importance politique des projets de Jeanne : restaurer la légitimité du roi Charles VII et l'amener au sacre.

    Par deux fois, la virginité de Jeanne fut constatée par des matrones, à Poitiers en mars 1429, mais aussi à Rouen, le 13 janvier 1431, l'évêque Cauchon avait ordonné ce deuxième examen pour trouver un chef d'accusation contre elle, en vain.

     

    Sources Wikipédia ; essentiellement les articles : Jeanne d'Arc, Guerre de cent ans, Henri 5, Traité de Troyes, Siège d'Orléans, Bataille de Patay, Charles 7, siège de Paris, Pierre Cauchon

     

    Nota bene personnel.

    A cette époque la France compte environ 15 millions d'habitants et l'Angleterre 4 millions, soit quasiment quatre fois moins. Imaginons un instant que le roi d'Angleterre soit devenu également roi de France. Au vu de l'influence anglaise et bourguignonne sur la plus grande partie du territoire, une grande partie de la population ne s'y serait probablement pas opposée.

    Sans Jeanne d'Arc, la France serait devenue anglaise, mais compte tenu des différences de population, les Anglais auraient été assimilés et, finalement, c'est l'Angleterre qui serait devenue Française. Il semblerait même que, à l'époque, certains Anglais perspicaces auraient souhaité que l'Angleterre ne gagne pas la guerre pour cette raison. Et peut-être qu'aujourd'hui la langue internationale serait le français !

     

  • Histoire (aussi) vraie (que possible) de Jeanne d'Arc - 2/3

    L'épopée de Jeanne.

    • Jusqu'au roi de France

    Domrémy où naît Jeanne est à la limite du territoire sous domination française, juste à côté du duché de Bourgogne, état, alors, beaucoup plus puissant que la France et allié des Anglais. A cette époque, la Normandie, la Guyenne sont sous domination anglaise.

    La France en 1429

    la France en 1429

    Jeanne est une jeune fille très, très pieuse. Elle dira lors de son procès qu'elle a entendu des voix « lui demandant d'être pieuse, de libérer le royaume de France de l'envahisseur et de conduire le dauphin sur le trône ».

    Son village, Domrémy est brûlé par une bande de pillards, très nombreux en cette époque troublée. Elle, sa famille et les habitants qui ont survécus, vont se réfugier à Neufchâteau avant de revenir lorsque les pillards seront partis.

    Lorsque les nouvelles du siège d'Orléans lui parviennent, en décembre 1428 ou janvier 1429, elle demande à son père l'autorisation de partir. Celui-ci la lui refuse. Elle lui demande alors l'autorisation d'aller aux « relevailles » d'une cousine, dans un village voisin, ce qu'il lui accorde.

    Les relevailles sont une cérémonie qui se fait à l'église lorsqu'une femme s'y rend la première fois après ses couches pour se faire bénir par un prêtre.

    Elle convainc le mari de sa cousine de l'accompagner chez le représentant du roi de France, à qui elle demande de l'incorporer dans les troupes du dauphin ! Gonflée la petite paysanne de 17 ans.

    Il faut savoir qu'à cette époque la hiérarchie entre les différents états des gens, en fonction de leur condition sociale, est très marquée. De plus on n'imagine pas une femme combattre parmi des soldats.

    Bien sûr Robert de Baudricourt, le représentant du roi, la prend pour une illuminée et la renvoie.

    C'est mal connaître la jeune fille. Elle ne retourne pas chez elle. Dotée d'un très grand charisme, elle finit par avoir une réputation de guérisseuse dans la population, avide à cette époque, de prophéties encourageantes, qui, du coup la soutient, ce qui lui permet d'obtenir un sauf-conduit pour aller voir le duc de Lorraine malade.

    Charles 2 de Lorraine

    Charles 2, duc de Lorraine, et Marguerite de Bavière, son épouse

    Elle a le culot de promette au duc de « prier pour sa guérison en échange de l'abandon par le duc de sa maîtresse et d'une escorte menée par René d'Anjou, gendre du duc et beau-frère du Dauphin Charles, pour libérer la France ». Quand je disais gonflée la demoiselle.

    Le seigneur de Baudricourt finit par lui donner une escorte composée de six hommes, dont un messager royal. Et voilà notre Jeanne partie pour le royaume de France après être allée se recueillir à l'église.

    Elle réussit à traverser des territoires plus ou moins occupés par les Anglais, en proie à la guerre, sans se faire violer, ce qui est pourtant extrêmement courant à l'époque, puisque même des châtelaines pouvaient se faire violer dans leur propre château ! Elle réussit cet exploit grâce au fait qu'elle porte probablement des habits d'homme et qu'elle a une coupe de cheveux masculine.

    Jeanne d'Arc

    Jeanne d'Arc chevauchant

    Elle parvient donc à Chinon où le dauphin s'est réfugié. Contrairement à la légende, elle n'est pas reçue tout de suite par le roi, pas plus qu'elle n'a eu besoin de le reconnaître. Par contre lorsqu'il la reçoit, deux jours plus tard, c'est dans ses appartements privés où elle lui fait part de sa « mission ».

    Elle ne sera reçue à la cour qu'un mois plus tard. Là elle annoncera quatre évènements : la libération d'Orléans, le sacre du roi à Reims, la libération de Paris – qui soutient fortement le roi d'Angleterre, et la libération du duc d'Orléans, oncle du roi, prisonnier à Londres depuis la défaite d'Azincourt.

    Elle est envoyée à Poitiers pour être examinée par les autorités ecclésiastiques, qui s'y sont réfugiées. Des docteurs en théologie réalisent son examen de conscience et des matrones, supervisées par la belle mère du roi, constatent sa virginité.

    De ces interrogatoires il n'y a plus de traces écrites.

    Après une enquête à Domrémy, le dauphin Charles donne son accord pour envoyer Jeanne à Orléans assiégée par les Anglais.

    Il faut savoir que le fait qu'elle soit vierge est considéré comme miraculeux à cette époque, au vu de ce qu'elle a fait, et cela lui confère une aura extraordinaire.

    Alors qu'elle part pour Orléans, elle fait expulser les prostituées ou bien les fait marier et fait précéder ses troupes d'ecclésiastiques.

     

    • Le siège d'Orléans

    La France est, grosso modo, coupée en deux au niveau de la Loire. Le nord est contrôlé par les troupes anglaises, le sud est sous le contrôle des Français. C'est pourquoi Orléans a une telle importance. Si les Anglais parviennent à prendre la ville, ils pourront alors attaquer plus facilement le dauphin.

    Quelques semaines auparavant, en avril, les Français ont tenté d'attaquer des convois de ravitaillement anglais, mais cela a tourné à la catastrophe. Depuis cette défaite, les troupes françaises sont démoralisées et ne prennent plus d'initiatives.

    Pendant des années, de vagues prophéties avaient circulé en France au sujet d'une jeune fille qui sauverait la France. Beaucoup de ces prophéties prédisaient qu'une jeune fille en armure viendrait des frontières de la Lorraine.

    La bataille d'Orléans est une bataille phare suivie par toute l'Europe.

    Au siège d'Orléans, elle n'est pas du tout cheffe de guerre, mais elle entre à Orléans, en avril 1429, avec un convoi de ravitaillement confié par le roi. Elle est équipée d'une armure et on lui a confié une bannière blanche sur laquelle elle a fait inscrire « Jesus Maria ». L'entrée du convoi dans la ville est protégé des Anglais par l'armée française qui mène des actions à d'autres endroits autour de la ville.

    La réputation de Jeanne l'a précédée, aussi lorsqu'elle arrive à Orléans la population l'accueille avec enthousiasme tandis que les capitaines de guerre sont très réservés.

    Jeanne qui décidément ne doute de rien, fait envoyer des messages aux commandants anglais dans lesquels elle se désigne comme « La Pucelle » et leur donne cet ordre : « Au nom de Dieu, retirez-vous, ou je vous ferai partir ».

    Il faut savoir qu'à cette époque très religieuse, les Anglais (encore catholiques) comme les Français sont persuadés que Dieu est de leur côté ! L'arrivée de Jeanne, avec son aura de prophétesse chargée de mission par Dieu, jette un grand trouble parmi les troupes anglaises, même si les commandants la conspuent, l'insultent en la traitant de putain et de sorcière.

    Elle a une telle foi, une telle confiance en elle et un tel enthousiasme, qu'elle ne doute de rien – sûrement, dans sa naïveté de jeune paysanne convaincue de sa mission sacrée, ne se rend elle pas vraiment compte des difficultés – mais du coup elle parvient à insuffler aux soldats français, démoralisés, le sentiment contraire de celui qu'elle inspire aux soldats anglais, une énergie nouvelle qui leur donne le courage de se battre vaillamment.

    Pendant les deux jours suivants, elle défile dans Orléans, en distribuant des vivres et la solde des soldats, ce qui galvanise et les habitants et les soldats.

    Dans les jours qui suivent, des renforts français étant arrivés, des attaques contre les forts anglais qui entourent la ville ont lieu, avec des victoires françaises. L'une de ces batailles, menée par Jeanne, tourne mal cependant et les soldats français s'enfuient. La légende dit qu'alors Jeanne, seule, fit demi-tour, leva son étendard et cria « Au nom de Dieu », ce qui aurait été suffisant pour impressionner les Anglais ce que voyant les Français font demi-tour et recommencent à se battre. Finalement les Français remportent la victoire.

    Jeanne au siège d'Orléans

    le siège d'Orléans

    Jeanne est blessée au pied lors de cette attaque. Le lendemain on lui demande de ne pas prendre part à l'attaque ce qu'elle refuse. En la voyant, de nouveaux habitants d'Orléans rejoignent les forces françaises. Pourtant l'attaque contre un nouveau fort anglais ne donne rien. Le soir les commandants français décident d'attendre le lendemain. Informée de cette décision, Jeanne se retire pour prier puis attrape une échelle et lance elle-même l'assaut. Les soldats français se précipitent derrière elle. Jeanne est blessée à l'épaule par un carreau (une flèche) d'arbalète. Le bruit de sa mort parcourt les troupes. Le moral des Anglais remonte, celui des Français baisse. Selon des témoignages, Jeanne retire elle-même la flèche et revient combattre, du coup c'est le moral des Anglais qui baisse et ce qui donne un nouvel élan aux Français.

    Après une lutte acharnée la victoire revient finalement aux Français. Une autre victoire française intercepte des renforts anglais. Les pertes anglaises sont très lourdes, les forts du sud de la Loire ne sont plus entre les mains anglaises ce qui enlève tout intérêt pour eux de continuer la lutte ici. Ils se retirent. Orléans est délivrée.

    Cet évènement fait l’effet d’une véritable bombe en Europe : le contraste est saisissant entre la lenteur du siège et la vitesse à laquelle il est levé dès l’intervention de Jeanne. Les contemporains croient y voir un miracle. Du côté français comme du côté anglais, la propagande fait rage, invoquant dans les deux cas le surnaturel, bon ou mauvais.

    Jeanne d'ARC à cheval

    Jeanne d'Arc à cheval

    Les Anglais battus à Orléans ne sont pas vaincus pour autant. Cependant Jeanne va rencontrer le roi pour lui faire part de la victoire et lui demander d'avancer vers Reims ville des sacres. Les commandants français lui déconseillent, arguant du fait que les positions anglaises sont encore trop fortes.

    Quelques semaines plus tard, après le repos des troupes, de nouvelles armes, de nouveaux renforts de volontaires désireux de combattre sous la bannière de Jeanne, les batailles reprennent, et les victoires françaises s'enchaînent. Toute la Loire est maintenant sous le contrôle des Français.

    Une armée anglaise de renfort arrive de Paris. Comme d'habitude en rase campagne, les commandants anglais pensent que leurs archers vont anéantir la cavalerie française. Malheureusement un incident va ruiner leurs espoirs. Les historiens militaires anglais rapportent qu'un cerf ayant traversé le champ près des lignes anglaises, les archers abattirent l'animal et poussèrent un cri de triomphe qui révéla leur position aux éclaireurs français. La cavalerie française les attaqua par leur flanc avant qu'ils aient pu organiser leur défense !

    Cette bataille de Patay est une défaite équivalente, pour l'armée anglaise, à celle d'Azincourt pour les Français. Les principaux commandants anglais sont soit tués, soit fait prisonniers.

    Bataille de Patay

    la bataille de Patay

    Désormais la route vers Reims était quasiment libre et Jeanne – qui n'a pas combattu à Patay – se rend à Loches où réside le dauphin et le convainc d'aller à Reims.

     

    • Le sacre à Reims

    La route de Reims est ouverte mais elle traverse les terres bourguignonnes, cependant l'armée du dauphin ne rencontre pas d'obstacle sur la route même. Cela montre que la cause du dauphin Charles, accompagné de Jeanne, remonte. Par contre la plupart des villes, bourguignonnes, ne veulent pas ouvrir leur porte. Plusieurs villes sont prises. À Auxerre, le commandant La Trimouille paye 2 000 écus d'or au ministre de la ville qui accepte que l'armée bivouaque hors de la ville et de la ravitailler. Plusieurs autres villes se soumettent.

    L'armée arrive le 4 juillet devant Troyes qui refuse d'ouvrir ses portes. L'armée y fait le siège mais au bout du quatrième jour les provisions françaises manquent. Le Conseil est réuni, Jeanne y participe. Les commandants veulent renoncer. S'adressant au roi, elle lui demande si l'héritier du trône de France aura foi en ses paroles, ce que Charles confirme : « Gentil Dauphin, cette cité est vôtre. Si vous voulez demeurer devant deux ou trois jours, elle sera en votre obéissance par amour ou par force ; et n'en faites aucun doute ».

    Jeanne d'Arc reçoit la mission de préparer l'assaut de la ville. On dit que les Troyens apercevant Jeanne d'Arc au milieu des soldats prennent peur et demandent à discuter des conditions de reddition de la cité. Dès le lendemain, Troyes ouvre ses portes. Il est plus probable que les Troyens ont eu peur d'être pris d'assaut par la puissante armée française.

    Le 14 juillet le Dauphin dort à Chalons en Champagne pendant que le duc de Bourgogne est à Paris pour organiser la défense de la ville. Dans le même temps il envoie des ambassadeurs au Dauphin pour lui demander la paix.

    Le 16 juillet le duc de Bourgogne quitte Paris pour retourner à Laon mais dans le même temps le Dauphin arrive au château de l'archevêque de Reims. Le dauphin somme les rémois de lui ouvrir leurs portes. Ceux-ci qui espèrent l'arrivée de secours anglais et bourguignons refusent. Malgré cela des négociations ont lieu et ils finissent par ouvrir leurs portes.

    De ce fait, le dimanche 17 juillet 1429 Charles reçoit l'onction et est donc sacré à Reims roi de France sous le nom de Charles 7. Jeanne lui rend hommage et lui déclare : «Gentil Roy, ores est exécuté le plaisir de Dieu qui vouloit que je levasse le siège d'Orléans, et que je vous amenasse en ceste cité de Rheims pour recevoir vostre saint sacre, en monstrant que vous estes vray roy, et celluy auquel le royaulme de France doibt appartenir ».

    Sacre du roi Charles 7

    le sacre du roi Charles 7

    Le deuxième événement des quatre de sa mission est rempli. Ce sera le dernier.

    Le rite essentiel est accompli ; le huitième sacrement, qui fait les rois et les marque du signe sacré du pouvoir légitime, est alors conféré à Charles VII, faisant de lui le monarque légitime, authentiquement désigné par Dieu.

    Charles 7

    le roi Charles 7

    L'effet politique et psychologique de ce sacre est majeur. Reims étant au cœur du territoire contrôlé par les Bourguignons et hautement symbolique, il est interprété par beaucoup à l'époque comme le résultat d'une volonté divine.

    Ces événements qui fourmillent d'anecdotes où les contemporains voient régulièrement des petits miracles, le tout conforté par leurs références explicites dans les procès, ont grandement contribué à forger la légende de Jeanne d'Arc.

    Le mythe de la chef de guerre commandant les armées du dauphin est un autre exemple de légende. C'est le duc de Bedford, régent du royaume de France pour les Anglais, qui lui attribue le rôle de chef de guerre de l'armée du roi envoyé par le diable, pour minimiser la portée de la délivrance d'Orléans et des défaites anglaises ultérieures.

    Les historiens contemporains la considèrent soit comme un porte-étendard qui redonne du cœur aux combattants et aux populations, soit comme un chef de guerre démontrant de réelles compétences tactiques.

    Quoi qu'il en soit, en cette période très religieuse, voire mystique, qui de plus est troublée, son rôle moral a dû être indéniable d'autant plus avec sa conviction infaillible en sa mission divine et son énergie.

     

  • Histoire (aussi) vraie (que possible) de Jeanne d'Arc - 1/3

    La vie de Jeanne d'Arc pourrait passer pour une belle légende si nous n'avions pas des preuves historiques des différents éléments de sa vie. En effet on possède les minutes – les comptes rendus – des deux procès, celui qui la condamne et celui qui la réhabilitera, ainsi que les écrits de son époque racontant ses exploits.

    Jeanne d'Arc est son nom le plus souvent retenu car, à cette époque, on écrivait les noms comme on les entendait et cela variait souvent d'une personne à l'autre, ainsi on trouve aussi pour son nom Tarc, voire Daly ou même Day.

    En fait d'Arc est son « surnom » , c'est à dire son nom de famille car selon la coutume locale – celle de sa région de naissance – on l'appelle par son matronyme, le nom de sa mère, qui est Rommée.

    Son lieu de naissance est bien Domrémy, dans le duché de Bar, actuel département des Vosges.

    Elle naît dans une famille de laboureurs, c'est à dire des paysans riches, qui possèdent au moins une partie des terres qu'ils labourent et qui possèdent des animaux. Son père a plusieurs fois été « doyen » du village, à peu pès l'équivalent du maire de nos jours. Sa date de naissance n'est pas connu avec certitude, mais elle-même, lors de son procès en 1431, dit avoir 19 ans ! Il n'est cependant pas impossible qu'elle ait eu 3 ans de plus.

    Maison natale de Jeanne d'Arc

    Maison natale de Jeanne

    D'après des écrits de l'époque, c'est une fille pas très belle mais avec une belle poitrine et une paysanne « solide » mais nous n'avons aucun portrait d'elle de son temps.

    Ainsi Jeanne d'Arc, petite paysanne illettrée, va sauver le roi de France entre 17 et 19 ans !

    Lire la suite